Alors Thomas, c'est l'ainé. Lui et Sonia sont les enfants d'un avocat prestigieux français, et d'une danoise qui bosse dans la mode. Une famille fortunée, qui a d'abord eu un enfant assez tôt, puis a attendu sept ans avant d'en faire un autre, une fille cette fois. Tom, il a grandit tout seul avec ces personnes obsédées par l'image parfaite de la famille. Le père vote à l'extrême droite, la mère est effacée et obéissante. Pas la joie. Tom, très vite, a apprit à faire la part des choses entre les mots de son père et le reste du monde. Il n'a pas pu être très proche de sa soeur petit, même si il tentait toujours plus de s'occuper d'elle. Et puis, à l'adolescence il s'est complètement éloigné de ses proches et il est devenu Red, skinhead, tête brulé passionné de musique, qui passe ses nuits dehors à écouter du Ska et fumer, le blouson en cuir sur le dos et le bandana rouge au bras, d'où son surnom. Cela a très vite énervé son père, et ils se sont fâchés. Pendant pas mal de temps le gamin a grandit de son coté, sans faire d'études, vivant de petits boulots, trainant avec des gars plus vieux, le crâne rasé sur les cotés et le look de tueur (alors que c'est un ange). À ce moment là, il décroche totalement de sa famille (sauf sa mère qui le rencontre de temps à autre, et l'appelle, parce qu'elle l'aime et qu'il lui manque). Et puis il y a trois ans, il a fini par sentir son compteur s'arrêter. Sasha est rentrée dans sa vie. Ils sont très vite tombés amoureux, destinés l'un à l'autre. Un heureux hasard qui les a poussé à emménager très tôt ensemble. Tom a laissé tomber son look de loubard, et a suivi sa bien aimée dans un petit appartement de Paris, elle vivant de petits boulots et de l'argent de ses parents et lui de sa musique. Guitariste, chanteur, passionné. Il enchaine les petits concerts pendant trois ans sans parvenir à se lancer, mais ils sont heureux. L'homme n'obéit toujours pas à son père, ne trouve pas de vrai travail. Plus aucun contact entre les deux hommes. Il y a trois mois, Sasha est décédée. Une stupide grippe non guérie, pas assez surveillée. Parce que cette maladie est trop banale pour faire mal. Depuis, le garçon a rangé sa guitare et a demandé pardon à son père. Il travaille comme cuisinier au Rabbit Pizza de Bagnolet. Il ne vit plus que comme un robot, ne se laisse plus le droit d'être heureux. Un zombie qui n'a plus rien d'autre à faire de ses journées que d'acheter des Cach et de les tatouer de ses propres mains, à l'encre de feutres fins, pour cacher la preuve qu'il a aimé et qu'elle n'est plus là. C'est un garçon renfermé, la peau marquée de cicatrices et de souvenirs, le look en décalé de la société dans laquelle il vit. Il se sent constamment en décalé, de toute façon.